AGRICULTURE ET DEVELOPPEMENT RURAL EN AFRIQUE CENTRALE : Une redéfinition des stratégies s’impose !
Il est commun de constater que l’agriculture et l’espace rural, constituent un réceptacle de premier choix pour le développement des activités agricoles. En effet, l’évolution rapide du contexte socio-économique national, sous-régional et international,
principalement la pauvreté et l’insuffisance alimentaire croissante,l’augmentation de la population, le développement et la diversification de la consommation individuelle, mais aussi les changements climatiques demandent à la recherche agricole de s’adapter en permanence et surtout à intensifier des pratiques de gestion dans le milieu rural. En Afrique centrale, les documents cadres de stratégie de lutte contre la pauvreté conduisent la plupart à des constats semblables : quelque 90% des pauvres sont des ruraux, 80% des agriculteurs sont pauvres et nombreux d’eux sont trop pauvres pour se nourrir convenablement, et la plupart des pauvres urbains sont des immigrants récents. Nombreuses sont les personnes qui pensent qu’il convient d’accorder la priorité au milieu rural et au secteur primaire qui est un véritable pôle et fournisseurs d’emplois, un frein des migrations de la population pour produire plus de denrées alimentaires et satisfaire les besoins sans cesse croissant. Ainsi un défi majeur actuel du secteur agricole en milieu rural est mis en exergue : la maitrise du surpeuplement rural en favorisant la croissance des villes et la
disponibilité du marché à travers un nombre de consommateurs non producteurs de denrées alimentaires, ce qui permettra la valorisation de l’agriculture et le développement du milieu rural.
Contribuer au développement d’un secteur rural dynamique pour bâtir un pays émergent, assure la conduite des activités dans le domaine des productions végétales, animales, halieutiques, forestières et de l’environnement, de la sociologie et de l’économie rurale, ainsi que des technologies alimentaires et l'agro-industrielles, et favorise la valorisation et la mise à disposition d’une main d’œuvre qualifiée. A cet effet, la population rurale agricole doit être formée. Ainsi, elle doit recourir à la spécialisation des exploitations comme moyen d’accroître leur production et leurs revenus ; l’adoption des techniques de production agricole plus intensives à travers l’acquisition d’une technologie adaptée devient alors possibles, et la sécurité alimentaire du plus grand nombre et la mobilité de la population doivent s’améliorer. Pour attirer la clientèle dans le milieu rural, il faut donc commencer par se tourner du côté des villes en comprenant leur fonctionnement (préférences, habitudes de consommation, comportements d’achats, moyens de paiement, pouvoir d’achat) ; comprendre comment le milieu urbain et le milieu rural interagissent afin de faciliter la circulation des personnes, des biens et services, de l’information et des flux financiers entre ces deux milieux.
Les efforts importants des agriculteurs et des producteurs de se spécialiser ayant aboutis à des acquis majeurs, l’attrait des partenaires financiers, les coopérations de développement et les capacités institutionnelles pour soutenir la population rurale notamment en matière de gestion administrative, scientifique, administrative, financière et comptable, d’information et de communication, d’informatisation, d’acquisition de matériels permettront une mise au point d’une production innovante et une valorisation de l’agriculture en milieu rural. Les politiques de coopération tant sur le long que le court terme doivent prendre en considération à travers une gestion de la dynamique du peuplement les migrations alternantes, la mobilité géographique et sociale qui est le maître mot de lutte contre la pauvreté ou plutôt l’enrichissement condition nécessaire de la stabilité de la croissance démographique et du développement durable. Les stratégies de développement doivent favoriser et non pas freiner les restructurations du peuplement. Car à trop vouloir réduire les disparités géographiques et privilégier les zones les plus retardées et y freiner l’exode, on risque tout simplement d’aggraver les disparités sociales et freiner la croissance globale.
Puisque l’économie populaire est d’essence locale, il faut chaque fois, inscrire les projets de développement dans une logique locale, et non plus seulement sectorielle et urbaine ou rurale. Et pour que ces projets ne soient plus octroyés mais soient portés par les intéressés ou bénéficiaires, il faut encourager les décideurs de chaque zone urbaine ou rurale à élaborer leur propre stratégie de développement local.Pour ce faire, il faut d’abord les aider à se doter des systèmes d’information adaptés aux besoins du développement local. Il faudra inciter les décideurs locaux à reconquérir le pouvoir par la connaissance (empowerment by knowledge) et à construire des coalitions d’intérêts locaux autour de stratégie de développement appuyées sur cette connaissance. Le détour par le niveau local met en évidence les carences des systèmes d’information existants, et offre ainsi une opportunité de reconstruire de nouveaux systèmes à la mesure des enjeux auxquels tous les partenaires sont confrontés. L’un des moyens de lutter pour l’enrichissement de tous les acteurs locaux et de dynamiser l’économie locale, consiste à augmenter la capacité d’interaction entre les opérateurs et les ménages du pôle urbain et rurale. Et l’un des moyens de lutter contre la précarité est de faire en sorte que les habitants en situation précaire gardent un pied en ville et un autre en milieu rurale et soient ainsi à même mesure de saisir toutes les opportunités. Pour cela, il faut réduire les coûts de transaction et les obstacles à la circulation des personnes, des biens, des services et de l’information. C’est sur cette question que les partenaires au développement devraient mettre l’accent. Enfin, une bonne connaissance des mécanismes de fonctionnement des économies locales et du rôle des collectivités territoriales décentralisées est indispensable pour soutenir le dynamisme de ces économies. A cet égard, les études montrent que les circonscriptions administratives d’Afrique Centrale sont plus pauvres que leurs habitants et que c’est l’insuffisance de la dépense publique locale qui constituent l’un des freins à l’activité locale. Il serait donc important de réhabiliter l’image de l’autorité locale ou élue à travers des réalisations concrètes en aidant les entrepreneurs locaux à prendre des initiatives à l’instar de l’augmentation des échanges locaux, amélioration de l’infrastructure, l’ouverture des zones d’activités périurbaines, etc.
Toute activité humaine consomme ou nécessite de la matière première, ce qui favorise le développement tant au niveau urbain que local. L’agriculture répond aux besoins socio-économiques formulés pour le développement rural. Elle développe des actions réelles pour une meilleure prise en compte des besoins des acteurs. Et parallèlement, l’émergence de nouveaux acteurs dans le secteur agricole, et des partenariats nouveaux avec ces derniers (producteurs, transformateurs, services et organismes d’appui, etc.) et leurs organisations encourage les stratégies dedéveloppement du milieu rural.
Une contribution de Martial Gervais ODEN BELLA et de Mlle ANNITA EBENYE